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Une très forte majorité de Français interrogés favorables à « un débat sur la politique des drogues »

Un sondage commandé par plusieurs organisations, dont Médecins du monde, la Fédération Addiction et le Syndicat de la magistrature, montre que pour une majorité de la population, la politique répressive en vigueur depuis cinquante ans est « inefficace ».

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Publié le 21 janvier 2021 à 19h31, modifié le 22 janvier 2021 à 09h21

Temps de Lecture 3 min.

Une forte majorité de la population française pense que la politique de répression n’est pas « efficace pour lutter contre la consommation de drogues », et se dit favorable « à l’organisation d’un débat sur la politique des drogues », selon un sondage CSA, publié jeudi 21 janvier.

L’étude, réalisée à la mi-décembre sur un échantillon représentatif de 1 007 personnes, a été commandée par le Collectif pour une nouvelle politique des drogues (CNPD), qui regroupe 19 organisations parmi lesquelles Médecins du monde, ASUD (Autosupport des usagers de drogues), la Fédération Addiction, Police contre la prohibition ou le Syndicat de la magistrature.

Qu’ils travaillent sur le terrain avec les usagers, sur la réduction des risques ou dans les domaines de la police ou de la justice, les membres du CNPD partagent depuis des décennies ce même constat, répété pour l’occasion par Marie Debrus de Médecins du monde :

« La politique de répression, mise en place après la promulgation de la loi instaurant la pénalisation de l’usage de drogues en France, dite loi de 1970, est inefficace. Ni la consommation de stupéfiants ni le trafic n’ont baissé. »

Pour les 50 ans de cette loi, « on a voulu savoir ce qu’en pensaient les Français. Et les résultats éloquents montrent que l’opinion publique juge inefficaces les politiques répressives aujourd’hui en place », dit-elle.

  • 66 % des personnes interrogées pensent que « la pénalisation pour usage n’est pas efficace pour lutter contre la consommation de drogue ».
  • 69 % pensent que « la pénalisation pour usage n’est pas efficace pour lutter contre le trafic de drogues ».
  • 73 % jugent que l’Etat « ne met pas en place suffisamment d’outils et de campagnes de prévention ».
  • 75 % pensent que « les mesures de réduction des risques actuelles sont insuffisantes ».
  • 82 %, enfin, sont favorables à « l’organisation d’un débat sur la politique des drogues incluant l’ensemble des acteurs concernés (médecins, policiers, usagers et famille d’usagers ».

C’est le dernier chiffre en particulier qui a semblé « extrêmement fort » aux organisations à l’origine de l’étude, explique Marie Debrus :

« Le sondage montre que les Françaises et les Français sont prêts à participer à ce débat. Nous sommes également prêts à le faire, dans l’espoir, un jour, de voir aboutir une politique qui ne soit pas basée sur la pénalisation des consommateurs. »

Lire l’éditorial du « Monde » : Drogue : sortir du tout-répressif

« Cela reste lettre morte au niveau de la décision politique »

Les questions posées par ce sondage, et surtout les réponses, sont loin d’être nouvelles. En 2016 déjà, un sondage Ipsos rapportait que 84 % des Français jugeaient « inefficace la législation actuelle » en ce qui concernait seulement le cannabis. Une récente étude du think tank de gauche Terra Nova analysait en détail l’échec de l’approche répressive et appelait à la mise en place d’une « autre stratégie policière et pénale ».

Ces réponses rejoignent des préoccupations plus actuelles, défendues par certains élus politiques, comme la récente ouverture d’une consultation publique sur le cannabis dit « récréatif ». Le questionnaire, qui demande, par exemple, « Pensez-vous que le dispositif actuel de répression de la consommation de cannabis permet d’en limiter l’ampleur ? », devra notamment permettre de « vérifier le constat fait par des sondages selon lequel près d’un Français sur deux est favorable à un changement de législation » pour le cannabis, a dit Caroline Janvier, députée La républiqueen marche (LRM) du Loiret.

Pour le CNPD, cette consultation est « un pas en avant », mais reste soumise « aux prises de position du ministère de l’intérieur et du gouvernement, [qui] restent aujourd’hui en faveur du tout-répressif ». « Des prises de position, des rapports en tous genres, des commissions parlementaires pour remettre en cause la politique de prohibition, il y en a eu des centaines depuis cinquante ans, relativise Jean-Maxence Granier, de ASUD. Cela reste lettre morte au niveau de la décision politique ».

L’actuel ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, ne risque pas d’être plus proactif. Celui qui a refusé tout débat sur la légalisation du cannabis, « cette merde », a fait de la lutte contre la consommation et le trafic des stupéfiants sa priorité, et de la publication des chiffres d’arrestations et de condamnations, sa marque de fabrique.

L’amende forfaitaire pour consommation de tout stupéfiant, généralisée en juillet et pouvant aller jusqu’à 450 euros, a été saluée par la plupart des fonctionnaires de police ou de gendarmerie, car elle permet de désengorger les commissariats et les tribunaux. Mais elle maintient le caractère délictuel de la consommation pour celles et ceux qui sont arrêtés, avec en prime une inscription au casier judiciaire.

Dès lors, les interlocuteurs politiques pour imaginer une sortie du « tout-répressif » ne sont plus à chercher Place Beauvau, selon le CNPD, mais au niveau local, comme à Villeurbanne, où un récent débat sur le cannabis a été « extrêmement productif », dit Marie Debrus. La preuve que les citoyens et les citoyennes « ont envie de discuter de ces questions ».

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